Langue Occitane, occitan, occitano, langue d'Oc, Loís Alibèrt, IEO, Gramatica occitana segon los parlars lengadocians, français-occitan, gallicismes, occitan-français, catalan, lenga, Mistral
Les noms doivent être considérés sous les rapports du genre, du nombre, et du cas.
La langue romane admet seulement les genres masculin et féminin, que l' article, la terminaison, font ordinairement reconnaître.
Elle admet deux nombres: le singulier et le pluriel; ils sont de même indiqués ordinairement par l' article, par la terminaison.
Le CAS fut ainsi nommé à cause du signe final distinguant les sujets et les régimes dans les langues qui terminent leurs noms par une variété de désinences ou chûtes, CASUS. Quelques grammairiens ont prétendu que, dans les langues modernes qui n' attachent point à leurs noms cette variété de désinences caractéristiques soit des sujets soit des régimes, il n' existait point de cas.
Quoique je préfère d' employer les expressions de Sujet et de Régime Direct ou Indirect, je me conforme quelquefois à l' usage, en me servant du mot de CAS, pour rendre mes idées plus sensibles, sur-tout quand j' établis des rapports avec les CAS des langues qui ont des désinences caractéristiques.
Presque tous les substantifs romans ayant été formés par la suppression de ces désinences qui marquaient les cas des substantifs latins, il serait aussi long que fastidieux de présenter ici le tableau de toutes les terminaisons des différents substantifs romans, soit masculins, soit féminins. Ces détails minutieux et compliqués appartiennent au Dictionnaire de la langue (Raynouard, Lexique Roman): il contiendra la classification des désinences très nombreuses et très variées qui indiquent les noms substantifs ou adjectifs; ces noms sont faciles à reconnaître soit à l' article ou aux prépositions qui les précèdent, soit au signe qui, dans la langue romane, distingue les sujets des régimes.
On a vu précédemment de quelle manière se faisait cette distinction caractéristique; de nouvelles observations et de nouveaux exemples confirmeront la règle, et offriront quelques détails nécessaires.
Au singulier, l' S final attaché à tous les substantifs masculins et à la plupart des substantifs féminins qui ne se terminent point en A, désigne qu' ils sont employés comme sujets, c'est-à-dire qu' ils remplissent la fonction du nominatif ou du vocatif; et l' absence de l' S désigne le régime direct ou indirect, c'est-à-dire que ces noms remplissent une fonction de génitif, de datif, d' accusatif, ou d' ablatif.
Au pluriel, les nominatifs et les vocatifs de ces noms, c'est-à-dire les sujets, ne reçoivent pas l' S; mais il s' attache aux génitifs, datifs, accusatifs, et ablatifs, c'est-à-dire aux régimes directs ou indirects.
Les régimes indirects sont facilement distingués, soit au singulier, soit au pluriel, par les prépositions DE et A, ou autres, qui précèdent les génitifs, datifs et ablatifs; et les régimes directs, par l' absence de ces prépositions, lesquelles ne sont jamais placées entre des verbes et un nom qui devient leur régime direct.
Les noms féminins en A, sujets ou régimes, ne reçoivent, dans aucun cas du singulier, l' S final, qu' ils gardent à tous les cas du pluriel.
Les substantifs qui originairement se terminent en S, le conservent dans tous les cas, soit au singulier, soit au pluriel.
Pour offrir des exemples de l' emploi de l' S, désignant au singulier les noms masculins comme Sujets, je choisis un couplet entier:
Valer m degra MOS PRETZ e MOS PARATGES
E ma BEUTATZ e plus MOS FINS CORATGES;
Per qu' ieu vos man, lai on es vostre ESTATGES,
Esta chanson, que me sia MESSATGES,
E voill saber, lo MIEUS BELS AMICS GENS,
Per que m' etz vos tan FERS e tan SALVATGES;
No sai si s' es ORGUELHS O MALS TALENS. (1)
Comtesse de Die: A chantar.
(1) Valoir me devrait mon prix et mon parage
Et ma beauté et plus mon tendre attachement;
C'est pourquoi je vous mande, là où est votre demeure,
Cette chanson, qui me soit message,
Et je veux savoir, ô le mien bel ami gent,
Pourquoi m' êtes vous tant cruel et tant sauvage;
Ne sais si c'est orgueil ou mauvaise volonté.
Je donne de même un couplet entier pour les exemples de l' absence de l' S, désignant au singulier les noms masculins comme régimes directs ou indirects:
Seinher Conrat, tot per vostr' AMOR chan,
Ni ges no i gart AMI ni ENNEMI;
Mas per so 'l fatz qu' ill crozat vauc reptan Del PASSATGE qu' an si mes en OBLI:
Non cuidon qu' a DEU enoia
Qu' ill se paisson e se van sojornan;
E vos enduratz FAM, SET, et ill stan. (1)
Bertrand de Born: Ara sai. (1) Seigneur Conrad, tout pour votre amour je chante,
Et aucunement n' y regarde ami ou ennemi;
Mais pour ce le fais que les croisés vais accusant
Du passage qu' ils ont ainsi mis en oubli:
Ils ne pensent pas qu' à Dieu il déplaise
Qu' ils se repaissent et se vont séjournant;
Et vous endurez faim, soif, et eux restent.
L' observation de cette règle et son utilité sont frappantes dans les phrases où le même nom est successivement employé et comme Sujet et comme Régime:
Qe mais mi notz A DEU SIAZ
Que DEUS VOS SAL no m' ajuda. (2)
Cadenet: Amors e cum er. (2: Parce que plus me nuit A DIEU SOYEZ Que DIEU VOUS SAUVE ne m' aide. Pour l' intelligence de ces locutions, je dois avertir que la première correspond à ADIEU, et signifie donc l' instant de la séparation; et que la seconde correspond à BON JOUR, et signifie celui de l' arrivée.)
Parmi les citations que je pourrais faire de la prose romane, je préfère ce passage qui commence l' ouvrage intitulé: Leys d' Amors:
“Segon que dis lo PHILOSOPHS, tut li home del mon desiron aver sciensa, de la qual nais SABERS, de SABER conoyssensa, de connoyssensa SENS, de SEN be far, de be far VALORS, de VALOR LAUZORS, de LAUZOR HONORS, d' HONOR pretz, de pretz PLAZERS, et de PLASER gaug e ALEGRIERS.” (1) (1) "Selon que dit le philosophe, tous les hommes du monde desirent avoir science, de laquelle naît savoir, de savoir connaissance, de connaissance sens, de sens bien faire, de bien faire valeur, de valeur louange, de louange honneur, d' honneur prix, de prix plaisir, et de plaisir joie et allégresse."
Il me reste à donner, pour le pluriel, des exemples de l' absence de l' S désignant les sujets, et de la présence de l' S désignant les régimes:
Plur. Sujet. De fin' amor son tuit MEI PENSAMEN
E MEI DESIR e MEI MEILLOR JORNAL. (2)
P. Raimond de Toulouse: De fin' amor.
En vos son pauzat MIEI VOLER,
E MIEI TALAN e MIEI DESIR. (3)
Elias de Barjols: Pus la bella.
Plur. Régime. En abril, quan vei verdeiar
LOS PRATZ VERTZ, e 'ls VERDIERS florir. (4)
Bernard de Ventadour: En abril.
Lo temps vai, e ven, e vire
Per JORNS e per MES e per ANS. (5)
Bernard de Ventadour: Lo temps.
Plur. Régime. Car qui be vol baissar e frevolir
SOS ENNEMICS, BOS AMICS deu chausir. (1)
Bernard Arnaud de Montcuc: Anc mais.
Pro ai del chan ESSENHADORS
Entorn mi et ENSENHAIRITZ,
PRATZ e VERGIERS, ARBRES e flors
Voutas d' AUZELНS e LAIS e CRITZ. (2)
Geoffroi Rudel: Pro ai del chan.
Voici des exemples des substantifs féminins en A au singulier, et en AS au pluriel.
Sing. Sujet. Que fara la vostr' AMIA?
Amicx, cum la voletz laissar! (3)
Bernard de Ventadour: En abril.
GUERRA m platz, sitot GUERRA m fan
Amors e ma DOMNA tot l' an. (4)
Bertrand de Born: Guerra.
Sing. Régime. Farai CHANSONETA NUEVA. (5)
Comte de Poitiers: Farai. Lanquan vei la FUELHA Jos dels arbres cazer. (6) Bernard de Ventadour: Lanquan vei. (1) Car qui bien veut abaisser et affaiblir Ses ennemis, bons amics doit choisir. (2) Assez j' ai du chant instituteurs Autour de moi et institutrices, Prés et vergers, arbres et fleurs, Cadences d' oiseaux et lais et ramages. (3) Que fera la votre amie? Ami, comment la voulez-vous laisser! (4) Guerre me plait, quoique guerre me font Amour et ma dame toute l' année. (5) Je ferai chansonette nouvelle. (6) Quand je vois la feuille En bas des arbres tomber.
Sing. Régime. Mielz no fa 'l venz de la RAMA,
Q' en aissi vau leis seguen,
Com la fuelha sec lo ven. (1)
Bernard de Ventadour: Amors enquera.
Plur. Sujet.
Las DONAS eyssamens
An pretz diversamens...
Las UNAS son plazens,
Las AUTRAS conoissens. (2)
Arnaud de Marueil: Rasos es.
Plur. Régime. E vey las AIGUAS esclarzir. (3)
Bernard de Ventadour: En abril.
Anc Persavals, quant en la cort d' Artus
Tolc las ARMAS al cavalier vermelh,
Non ac tal joy. (4)
Rambaud de Vaqueiras: Era m requier.
De las DOМNAS me desesper:
Jamais en lor no m fiarai. (5)
Bernard de Ventadour: Quan vei la laudeta. (1) Mieux ne fait le vent de la ramée, Vu qu' ainsi je vais elle en suivant, Comme la feuille suit le vent. (2) Les dames également Ont prix diversement... Les unes sont agréables, Les autres savantes. (3) Et je vois les eaux éclaircir. (4) Oncques Perseval, quant en la cour d' Artus Il enleva les armes au chevalier vermeil, (: rouge) N' eut telle joie. (5) Des dames me désespère: Jamais en elles ne me fierai.
J' ai dit que les substantifs terminés en S le gardaient à tous les cas du singulier et du pluriel, soit qu' ils fussent employés comme Sujets, soit qu' ils le fussent comme Régimes; je choisis pour exemples les noms TEMPS, temps; VERS, vers; OPS, besoin, avantage.
Sujets.
Lo gens TEMPS m' abellis e m platz. (1)
Arnaud de Marueil: Lo gens temps.
Qu' entr' els lurs gabs passa segurs mos VERS. (2)
Arnaud de Marueil: L' ensenhamentz.
Ab fina joia comensa
LO VERS qui be 'ls motz assona. (3)
Pierre d' Auvergne: Ab fina.
Car mot l' es OPS sacha sofrir
Que vol a gran honor venir. (4)
Arnaud de Marueil: Totas bonas.
Régimes. Totz TEMPS vos amaria,
Si totz TEMPS vivia. (5)
Arnaud de Marueil: Sabers.
Per joi qu' ai dels e d' el TEMPS. (6)
Arnaud Daniel: Autet e bas. (N. E. “Tan m' abellis vostre cortes deman,
qu' ieu no me puesc ni voill a vos cobrire.
Ieu sui Arnaut, que plor e vau cantan;
consiros vei la passada folor,
e vei jausen lo joi qu' esper, denan.
Ara vos prec, per aquella valor
que vos guida al som de l' escalina,
sovenha vos a temps de ma dolor!”. Divina Commedia, Dante Alighieri.)
Estat ai dos ans
Qu' ieu no fi VERS ni chanso. (7)
Bernard de Ventadour: Estat ai.
Dirai un VERS que m' ai pensat. (8)
Rambaud d' Orange: Als durs.
(1) Le gentil temps me charme et me plait. (2) Qu' entre leurs plaisanteries passe assuré mon vers. (3) Avec pure joie commence Le vers qui bien les mots accorde. (4) Car beaucoup lui est besoin que sache souffrir Qui veut à grand honneur venir. (5) En tous temps je vous aimerais Si en tous temps je vivais. (6) Par joie que j' ai d' eux et du temps. (7) Été j' ai deux ans Que je ne fis vers ni chanson. (8) Je dirai un vers que j' ai pensé.
Régime.
E chanta SOS VERS raucament. (1)
Le Moine de Montaudon: Pus Peire.
Ben vuelh que sapchon li plusor
D' est VERS, si 's de bona color. (2)
Comte de Poitiers: Farai un vers.
Lai on m' agra ops que fos saubuz mos vers. (3)
Folquet de Marseille: Chantan volgra.
Qu' a vos soi fis e a mos ops trayre. (4)
Folquet de Marseille: Tan m' abellis.
Concurremment avec la règle qui désigne par l' S final le sujet au singulier, la langue romane usa d' une forme spéciale pour quelques substantifs masculins, dont le nominatif au singulier se termina différemment des autres cas du singulier et de tous ceux du pluriel.
Ces substantifs reçurent la finale AIRE, EIRE, IRE, comme sujets au singulier, et la finale ADOR, EDOR, IDOR, comme régimes directs ou indirects au singulier, et comme sujets ou régimes au pluriel.
AIRE: sujet.
"Pistoleta si fo CANTAIRE d' En Arnaud de Marueil, e fo de Proensa, e pois venc TROВAIRE, e fez cansos.” (5)
Vie manuscritte de Pistoleta. Ms. royale 7225, fol. 137.
C' anc no fui fals ni TRICHAIRE. (6)
Bernard de Ventadour: Lo rossignols.
(1) Et chante ses vers rauquement. (2) Bien veux que sachent la plupart De ce vers, s' il est de bonne couleur. (3) Là où j' aurais besoin que fût su mon vers.
(4) Qu' à vous je suis fidèle et à mes avantages traître.
(5) "Pistoleta ainsi fut chanteur d' Arnaud de Marueil, et fut de Provence,
et puis devint troubadour, et fit des chansons.”
(6) Que jamais je ne fus faux ni tricheur.
AIRE: sujet.
Qu' ieu chant gais e joios,
Pois cil cui sui Amaire,
Qu' es la gensor qu' anc fos,
Vol mi e mas chansos. (1)
Gaucelm Faidit: L' onrat jauzens.
ADOR: régime.
Vergiers ni flors ni pratz
No m' an fait Cantador;
Mas per vos cui ador,
Domna, m sui alegratz. (2)
Pierre Raimond de Toulouse: S' ieu fos.
Cantarai d' aquest Trobadors
Qui chantan de mantas colors. (3)
Pierre d' Auvergne: Cantarai.
Amic ai de gran valor
Que sobre totz seingnoreia
E non a cor Trichador. (4)
Azalais de Porcairague: Ar em al freg.
Vos am e no m recre
Per mal ni per dolor;
Tan vos ai cor de lial Amador! (5)
Gaucelm Faidit: Razon.
(1) Que je chante gai et joyeux,
Puisque celle dont je suis l' amant,
Qui est la plus gentille qui onc fut,
Veut moi et mes chansons.
(2) Verger, ni fleur, ni pré
Ne m' ont fait chanteur;
Mais par vous que j' adore,
Dame, je suis inspiré.
(3) Je chanterai de ces troubadours Qui chantent de maintes couleurs. (4) Ami j' ai de grande valeur Qui sur tous domine Et n' a pas coeur tricheur. (5) Je vous aime et ne me lasse Par mal ni par douleur; Tant pour vous j' ai coeur de loyal amant.
EIRE: sujet. E s' anc fuy gays Entendeire ni drutz. (1).
Rambaud de Vaqueiras: D' amor no m lau.
EDOR: Rég. D' una dona qu' a dos Entendedors. (2) Rambaud de Vaqueiras: Seigner.
IRE: sujet.
E ill serai hom et amicx e Servire. (3)
Bernard de Ventadour: Ben m' an.
Doncs, belha, membransa
N' aiatz qu' ieu no us sui Mentire. (4)
Gaucelm Faidit: Coras que m.
IDOR Rég. Bona dompna, plus no us deman
Mais que m prendaz a Servidor. (5)
Bernard de Ventadour: Non es meraveilla.
Car del tornar ai paor
Que me tegna per Mentidor. (6) (N. E. tegna : tenga)
Gaucelm Faidit: d' un dolz bel. (1) Et si oncques je fus gai poursuivant et galant. (2) D' une dame qui a deux poursuivants. (3) El lui serai homme-lige, et ami et serviteur. (4) Donc, belle, souvenir En ayez que je vous suis menteur. (5) Bonne dame, plus ne vous demande Si non que me preniez à serviteur. (6) Car du retour j' ai peur Qu' elle me tienne pour menteur.
Quand j' indique les principales règles qui, dans la langue romane, servent à distinguer les sujets et les régimes, je ne dois pas omettre que cette langue possède plusieurs substantifs qui, par leur double terminaison masculine et féminine, pouvaient être employés tour-à-tour dans le genre qui convenait aux auteurs.
Ces mots sont en grand nombre; le dictionnaire roman les indiquera; je me borne à donner les exemples de FUELH et FUELHA, de JOY et JOYA.
LO FUELHS e 'l flors e 'l frugz madurs. (1)
Pierre d' Auvergne: Lo fuelhs.
Quan la vert FUELHA s' espan
E par flors blanqu' el ramel. (2)
Bernard de Ventadour: Quan la vert.
Tos temps sec JOI ir' e dolors,
E tos temps ira JOIS e bes. (3)
Bernard de Ventadour: Ja mos chantars.
No sai JOYA plus valen. (4)
Geoffroi Rudel: Quan lo.
Le substantif DONS est employé dans le même sens que le substantif DOMNA, mais alors le pronom possessif qui y est joint est MI, TI, SI:
Sujet:
E MI DONS ri m tan doussamens. (5)
Rambaud d' Orange: Ab nov joi. (nov : nou; bov : bou; etc.)
Régime.
Amicx, quan se vol partir
De SI DONS, fai gran enfansa. (6)
Gaucelm Faidit: Sitot ai.
Pois a MI DONS no pot valer
Dieus ni merces ni' l dreich qu’ ieu ai. (7)
Bernard de Ventadour: Quan vei la laudeta.
(1) La feuille et la fleur et le fruit mûr. (2) Quand la verte feuille s' épaud. (3) En tous temps suivent joye la tristesse et la douleur,
Et en tous temps tristesse la joye et le bien. (4) Je ne sais joye plus précieuse. (5) Et ma dame rit à moi si doucement. (6) Un ami, quand il veut se séparer De sa dame, fait grand enfantillage. (7) Puisqu'à ma dame ne peut valoir Dieu ni merci ni le droit que j' ai.
Enfin la langue romane employa quelquefois un signe particulier pour précéder et faire reconnaître les noms propres des personnes qualifiées.
EN désigna les noms propres masculins.
NA désigna les noms propres féminins. (1)
Trobey la molher d' EN Guari
E d' EN Bernart. (2)
Comte de Poitiers: En Alvernhe.
E fa tota la linhada
Que pres d' EN Adam naissensa. (3)
Gavaudan le Vieux: Un vers.
NA Beatrix, Dieus qu' es ples de merce
Vos accompanh' ab sa mair' et ab se. (4)
Aimeri de Peguillan: De tot en tot.
NA subissait quelquefois l' élision devant les noms qui commençaient par des voyelles:
So dis N' Agnes, e N' Ermessen:
Trobat avem qu' anam queren. (5)
Comte de Poitiers: En Alvernhe.
(1) On conçoit que NA a pu venir de domna, par la suppression de DOM, mais il est plus difficile d' expliquer d' où dérive EN (Mossen : Mon seigneur etc). M. de Marca a proposé ses conjectures à ce sujet dans le Marca Hispanica, liv. 3, c. 9. (2) Je trouvai la femme de Guarin Et de Bernard. (3) Et fait toute la lignée Qui prit d' Adam naissance. (4) Dame Béatrix, Dieu qui est plein de merci Vous place avec sa mère et avec soi. (5) Ce dit dame Agnès, et dame Ermessen: Trouvé avons ce que nous allons cherchant.
EN et NA furent placés même devant les sobriquets ou les noms fictifs qui étaient donnés à ces personnes qualifiées.
Ainsi Bertrand de Born, qui donne au roi Richard le sobriquet d' OC E NO, OUI ET NON, dit de lui:
Et Arnaud de Marueil appelant sa dame SES MERCE, SANS MERCI:
NA SES MERCE, trop s' afortis
Vostre durs cors encontra mey. (3)
Arnaud de Marueil: Cui que fin' amors.
(1) Seigneur oui et non veut la guerre plus Que ne fait aucun des Alguais. (*: noms de fameux brigands qui étaient quatre frères.) (2) Dame pur amour, fontaine de bontés, Merci je te demande, las! ne m' accuse.
(3) Dame sans merci, trop se renforce Votre dur coeur contre moi.
Verbes employés substantivement.
A l' exemple de la langue grecque et de la langue latine, les présents des infinitifs furent souvent employés substantivement.
Comme sujets, ils prirent ordinairement l' S final, mais ils ne le prirent pas toujours.
Comme régimes, ils rejetèrent l' S final.
Les régimes indirects furent précédés des prépositions qui les désignent.
Quelquefois l' article fut joint à ces verbes, soit sujets, soit régimes; quelquefois ils furent employés sans articles, ainsi qu'on le pratiquait à l' égard des substantifs mêmes. Voici des exemples de l' infinitif des verbes romans employés substantivement.
Sujets sans articles. CHANTARS me torna ad afan,
Quan mi soven d' En Barral. (1)
Folquet de Marseille: Chantars.
El dieus d' amor m' a nafrat de tal lansa
Que no m ten pro SOJORNARS ni JAZERS. (2)
Folquet de Marseille: Chantan.
Que VIURES m' es marrimens et esglais,
Pus morta es ma dona n' Azalais. (3)
Pons de Capdueil: De totz caitius.
Sujets avec articles.
Pus LO PARTIRS m' es aitan grieus
Del seignoratge de Peytieus. (4)
Comte de Poitiers: Pus de chantar.
(1) Chanter me tourne à chagrin, Quand il me souvient de Barral. (2) Le dieu d' amour m' a blessé de telle lance Que ne me tient profit le reposer ni le coucher. (3) Que vivre m' est chagrin et effroi, Depuis que morte est ma dame Azalais. (4) Puisque le séparer m' est si pénible De la seigneurie de Poitou.
Sujets avec article.
Val lo bon cor e 'L GEN PARLARS
E' l merces e l' HUMILIARS Mais que riquezas ni poders. (1)
Arnaud de Marueil: Si que vos.
Granz affars es LO CONQUERERS,
Mais LO GARDAR es maestria. (2)
Gaucelm Faidit: Chascun deu.
Lanquan la vei, me te 'L VEZERS jauzen. (3)
Pons de Capdueil: Aissi m' es pres.
Sujets au pluriel.
Ben sai qu' a sels seria fer
Que m blasmon quar tan soven chan,
Si lur costavon MEI CHANTAR. (4)
Rambaud d' Orange: Ben sai.
Soffrissetz qu' a vostr' onransa
Fosson mais TUICH MEI CHANTAR. (5)
Gaucelm Faidit: Al semblan.
Rég. Direct.
En mon cor ai UN NOVELET CANTAR
PLANET e LEU e qu' el fai bon auzir
A totz aisselhs qu' en joy volon estar. (6)
Arnaud de Marueil: En mon cor.
(1) Vaut le bon coeur et le gentil parler Et la merci et le condescendre Plus que richesse ni pouvoir. (2) Grande affaire est le conquérir, Mais le garder est science. (3) Quand je la vois, me tient le voir jouissant. (4) Bien je sais qu' à ceux serait dur Qui me blâment parce que si souvent je chante, Si leur coûtaient mes chanters. (5) Souffrissiez qu' à votre honneur Fussent désormais tous mes chanters. (6) En mon coeur j' ai un nouveau chanter Simple et léger et qu' il fait bon ouir A tous ceux qui en joie veulent être.
Rég. ind. sans article.
AB CELAR et AB SOFFRIR
Li serai hom e servire. (1)
P. Raimond de Toulouse: Altressi.
E tal es EN GRAN POIAR (N. E. chap. pujá, puchá; pujar)
Cui la rod' EN BREU VIRAR
Fai SON POIAR e DESCENDRE. (2)
Giraud de Borneil: Honratz es hom.
Rég. Ind. avec article.
Messatgier, vai, e no m' en prezes meinhs,
S' ieu DE L' ANAR vas mi dons sui temens. (3)
Bernard de Ventadour: Quant erba.
Ma dompna m fo, AL COMENSAR,
Francha e de bella conpaigna. (4)
Bernard de Ventadour: Estat ai.
Aux verbes employés substantivement s' attachent, comme aux véritables substantifs, les pronoms possessifs, démonstratifs, etc., et tous les différents adjectifs; en un mot, ces verbes remplissent entièrement les fonctions des substantifs ordinaires.
La langue romane emploie aussi substantivement les adjectifs, quand elle s' en sert d' une manière impersonnelle; j' en donnerai des exemples dans le chapitre suivant.
(1) Avec celer et avec souffrir Je lui serai homme-lige et serviteur. (2) Et tel est en grand monter A qui la roue en brief tourner Fait son monter et descendre. (3) Messager, va, et ne m' en prise moins, Si moi de l' aller vers ma dame suis craintif. (4) Ma dame me fut, au commencer, Franche et de belle société.
Article
paru dans : CAUBET (Dominique), CHAKER (Salem) & SIBILLE (Jean)
éds. 2002, Codification des langues de France. Actes du colloque
"Les langues de France et leur codification, écrits ouverts,
écrits divers" (Paris – Inalco, 29-31 mai 2000),
L‟Harmattan, Paris, pages 17-37
Ecrire
l‟occitan : essai de présentation et de synthèse
Jean
SIBILLE
Mille
ans d‟écriture occitane.
L‟Occitan
s‟écrit depuis au moins 1000 ans et doit être considéré comme
une des grandes langues de culture de l‟Europe. Les premiers
texteslittérairesapparaissent aux alentours de l‟an 1000 : la PassiondeClermont(vers 950), le PoèmesurBoèce(vers
l‟an 1000), les poésies religieuses de Saint-Martial de Limoges
(début du XIème siècle), la Chanson de Sainte Foi
(vers 1040).
A
partir du XIIème siècle on assiste au développement de
la poésie des troubadours qui rayonne dans toute l‟Europe et est à
l‟origine de la poésie lyrique européenne ; plus de 2500 poèmes
ont été conservés (et quelques 250 mélodies). Parmi les oeuvres
majeures de la littérature occitane médiévale, il faut également
citer la Chanson de la Croisade, récit en vers de la
croisade contre les albigeois et le Roman de Flamenca, roman
courtois sur le thème du désir et de la jalousie.
Aux
XIVème et XVème siècles, la littérature
occitane entre dans une phase de déclin relatif et ne joue plus un
rôle déterminant au niveau européen. Pendant ce temps le français
acquiert un certain prestige littéraire aussi bien dans le royaume
que hors du royaume et la littérature d‟oïl va jouer un rôle
moteur au niveau européen. Mais il s‟agit là de phénomènes
relevant de l‟histoire littéraire ; cette situation ne constitue
pas une menace pour la pratique de l‟occitan et ne conduit pas à
une substitution du français à l‟occitan comme langue écrite.
On
possède un certain nombre de chroniques en occitan, dont la
rédaction s‟échelonne du XIIème au début du XVIème
siècle : la chronique romane de Montpellier dite du Petit
Thalamus (1088-1428), la Chronique du siège de Damiette
(XIIIème siècle), la Chronique des comtesdeFoix(XVème
siècle), l‟Histoirejournalière(1498-1539) du
marseillais Honorat de Valbelle... [17/18]
Dans
le domaine de l‟écritnonlittéraireon assiste, dès le Xème
siècle, à l‟apparition de mots, d‟expressions, de membres de
phrases et parfois de phrases entières (serments) en occitan, dans
des textes en latin (latin farci). A la fin du XIème
siècle apparaissent les premiers textes rédigés entièrement en
occitan, ce sont, dans un premier temps des listes ou des inventaires
ne comportant pas de verbes conjugués, (une liste de cens conservée
dans le cartulaire de l‟abbaye de Sauxillanges (63), rédigée
entre 1060-1073 est le plus ancien document connu de ce type).
Le premier texte connu rédigé entièrement en occitan, daté et
comportant des phrases complètes avec des verbes conjugués, est
l‟acte de donation des biens d‟un hobereau rouergat, Adémar Ot,
à sa fille Guilhelma (10 avril 1102).
Au
XIIème siècle, l‟usage de l‟occitan pour la
rédaction de documents non littéraires est attesté par un certain
nombre de chartes. Au XIIIème siècle il s‟étend à
l‟ensemble des provinces
d‟oc.
Aux XIVème et XVème siècles cet usage,
concurremment au latin, est courant dans tous les domaines de
l‟écrit : chartes, archives municipales, pratique notariale,
procès verbaux des assemblées d‟Etats, contrat commerciaux,
correspondance administrative, commerciale, privée, livres de raison
...etc. Enfin, il faut signaler qu‟à partir du XIIIème
siècle, l‟occitan a été utilisé comme langue scientifique
(traités de mathématique, de chirurgie, de botanique, de grammaire
et de poétique...)
Les
Premiers textes en français apparaissent dès la fin du XIVème
siècle dans le Nord de l‟Auvergne, mais cent ans plus tard dans le
sud de la même province. C‟est dans le courant du XVIème
siècle que le français se substitue massivement et
définitivement à l‟occitan, comme langue écrite, dans
l‟ensemble des provinces d‟oc. Les textes les plus tardifs
rédigés vers 1620, proviennent du Rouergue et de Provence
orientale. Le registre paroissial de Rieupeyroux (Aveyron) est rédigé
en occitan jusqu‟à l‟an 1644. Le Béarn constitue une exception,
puisque le gascon y est utilisé jusqu‟en 1789, voire jusque vers
1815 par certains notaires.
C‟est
également au XVIème siècle
que les usages graphiques médiévaux tombent en désuétude.
Entre 1550 et 1650, au moment même où le français se généralise
pour l‟ensemble des usages écrits, on assiste, en Provence, en
Languedoc et en Gascogne, à une renaissance poétique. Mais les
écrivains de cette “Renaissance baroque” utilisent des graphies
individuelles, plus ou moins inspirées des conventions en usage
pour le français ; seul le poète Pey de Garros, conseiller au
Parlement de Pau, a une véritable réflexion sur la graphie et
utilise un système s‟efforçant de concilier les anciens usages et
les exigences de notation de la langue moderne, mais il ne sera pas
suivi.
De
l‟an 1000 jusqu‟à 1500 ou 1550 l‟écrit occitan est dans une
situation de normalité sociale, même s‟il existe une autre langue
écrite : le latin. Durant cette période, il gagne constamment du
terrain sur ce dernier dont les usages régressent. De fait,
l‟intrusion du français a lieu au moment même où l‟occitan
est sur le point de supplanter définitivement le latin
comme langue écrite usuelle.
Après
1550, l‟écrit occitan est dans une situation de marginalité : on
écrit en occitan soit pour faire de la littérature populaire
(théâtre carnavalesque, chansons...), soit par une démarche qu‟on
qualifierait aujourd‟hui de choix militant. Ce “choix militant”
est exprimé dès la fin du XVIème siècle par Pey de
Garros qui déclare choisir d‟écrire en gascon : [18/19]
Per
l‟aunor deu país sosténguer. (Poursoutenirl’honneurdupays)
Et per sa dignitat manténguer. (Et pour maintenir sadignité)
Jusqu‟au
XIXème siècle on est dans une période d‟anarchie
graphique. Parallèlement la littérature occitane se cantonne de
plus en plus dans des genres considérés comme mineurs ou populaires
(chanson, théâtre carnavalesque, parodies burlesques...).
L‟émergence de graphies codifiées modernes est le résultat d‟un
processus, lié à la renaissance littéraire de la langue et au
militantisme culturel, qui commence vers 1850 et qui n‟est pas
encore totalement achevé.
A
la fin du XVIIIème siècle on commence à redécouvrir
les textes du Moyen Age et à partir du début du XIXème
on assiste à différentes tentatives de codification de la graphie
sur la base des usages médiévaux : Fabre d‟Olivet (Languedoc
oriental), Honnorat (Provence), abbé Moutier (Drôme), Joseph Roux
(Limousin)... mais jusqu‟au début du XXème siècle ce
sont d‟autres types de graphie qui restent d‟un usage majoritaire
(notamment la graphie dite mistralienne pour le provençal, dont on
va reparler).
Au
XXème siècle les félibres
languedocien de l‟Escòla Occitana (Estieu et Perbosc) et du Grelh
Roergàs (Mouli), puis le mouvement occitaniste, dotent
l‟occitan d‟une graphie unifiée qui représente une
codification et une adaptation à la langue moderne de la graphie en
usage dans les textes médiévaux. C‟est une graphie
englobante qui atténue à l‟écrit les différences
dialectales sensibles à l‟oral, tout en respectant l‟originalité
de chaque dialecte. Elle a été codifiée de façon à peu près
définitive par le grammairien (et pharmacien) Louis Alibert
(1884-1959). Mais dans l‟usage des flottements subsistent sur
certains détails graphiques et sur quelques questions de norme
linguistique (principalement la question du -e dit “de
soutien”
dans
les emprunts savants). Le Conseil de la Langue Occitane (CLO), créé
d‟abord de façon informelle, puis constitué en association en
1998 s‟efforce de résoudre ce genre de questions.
La
graphie normalisée ou “occitane”, présentation.
La
graphie normalisée ou occitane ou classique est, comme
on vient de le voir, issue de la codification et de l‟adaptation à
la langue moderne des usages graphiques médiévaux. De ce fait, elle
revêt un aspect archaïsant et étymologisant. Mais d‟un point de
vue fonctionnel elle se caractérise essentiellement par son
caractère englobant : un même graphème peut donner lieu à des
réalisations différentes suivant les parlers, par exemple :
j(et g+ e, i) peut être réalisé
[d], [dz], [t], [ts], [z], [] (voir annexe II)
s
morphème du pluriel, et certaines consonnes finales telles que
p, t, c, ch sont écrites systématiquement mais peuvent être
ou non réalisées1 suivant les dialectes.
a
final post-tonique (qui s‟oppose à /e/, /i/, /u/, /y/),
peut être réalisé : [], [a], []... (voir annexe I).
[19/20]
nfinal est noté systématiquement alors qu‟il s‟est amuï
dans la plupart des parlers de l‟ouest Occitan (Languedoc,
Limousin, Auvergne et une partie de la Gascogne),
iá
peut être réalisé [j] ou [je].
Mais,
pour chaque variété, les correspondances graphie/phonie sont, en
principe, régulières et le système reste cohérent. De plus, le
caractère englobant de la graphie n‟implique pas qu‟il n‟y ait
pas de variantes à l‟écrit. Les variantes dites irréductibles2
sont notées : nuèch/ nuèit (nuit) , fach
/ fait (fait), vergonha / vergonja (honte),
cantar / chantar (chanter) ; sentiá (il
sentait) peut valoir [sen'tje] ou [sen'tj] mais on écrira sentia
[sen'tia] à Nice3.
Cette
graphie n‟est pas strictement phonologique mais plutôt
sur-phonologiquedans la mesure où elle note
toujours plus d‟opposition qu‟il n‟en existe dans tel
ou tel parler vernaculaire ou dans tel ou tel standard de
prononciation, par exemple :
opposition
/b/-/v/ qui a disparu en languedocien et en gascon.
triple
opposition / / d / t /, souvent réduite à deux
termes, voire à un seul dans certains parlers languedociens (voir
annexe II).
opposition
tz [ts] / s [s] en finale, disparue en dehors du
gascon et du languedocien aquitano- pyrénéen.
opposition
entre diphtongues et triphtongues telles que iu [iw] / ieu
[jew], la plupart des parlers connaissant l‟une ou l‟autre,
mais rarement les deux.
Enfin,
il faut signaler que le phonème /u/ est noté o, le phonème
// est noté ò, le phonème // : nh, et le
phonème // : lh.
On
peut dire que la graphie normalisée note ce que Pierre Bec, à la
suite de Weinreisch a appelé un dia-système et que l‟apprentissage
de la graphie suppose l‟apprentissage de ce dia- système.
Dans
une graphie de ce type, le lien graphie/phonie n‟est pas explicite
: il n‟y a pas de lisibilité universelle dans le sens où
je peux lire un texte à haute voix avec ma prononciation sans du
tout savoir comment il serait prononcé par l‟auteur. Pour le
savoir, il me faut connaître le parler de l‟auteur (ou au moins,
les règles de correspondances graphie / phonie propres au parler de
l‟auteur) ou disposer d‟une transcription phonétique. En
revanche, elle rend possible
1
Mais même là où elles sont réalisées, elles le sont à la
pause mais pas toujours en phonétique syntactique, car il se produit
des phénomènes de sandhi. En outre, dans les dialectes où elles ne
sont pas prononcées à la pause, elles sont plus où moins latentes
car elles réapparaissent dans certaines liaisons, ou dans la
dérivation (voir annexe I).
2
En fait : non réductibles par la graphie.
3
On notera que, indépendamment de toute référence à
l‟étymologie, la forme niçoise sentia [sen'tia] (sans
accent
sur le a) , légitimise le -á de sentiá
[sen'tje]~[sen'tj].
une
lecture cursive des textes sur l‟ensemble de l‟espace
occitan alors qu‟une transcription phonétique ne permet qu‟un
simple déchiffrage dès lors que le parler du scripteur s‟éloigne
quelque peu de celui du lecteur.
Actuellement
cette graphie est largement majoritaire dans la plupart des régions
occitanes4, sauf en Provence où elle reste fortement
concurrencées par la graphie dite mistralienne, mise au point au
XIXème siècle par Joseph Roumanille. C‟est en graphie
[20/21] mistralienne et en provençal rhodanien qu‟ont été
écrites une grande partie des oeuvres majeures de la renaissance
littéraire du XIXème siècle.
La
graphie mistralienne5et la question de la graphie en Provence.
Dans
la Provence de la fin du XVIIIème siècle la graphie
“classique” (médiévale) même si elle n‟est plus pratiquée
est, d‟avantage qu‟en Languedoc, considérée comme autochtone.
Jusqu‟en 1789, elle est connue et lue par les juristes pour des
raisons utilitaires, car les Statuts de Provença, qui
sont la base du droit local, ont été rédigés en occitan au
XIVème siècle. Mais les différences entre les usages
graphiques du XIVème et ceux du XVIIIème
sont interprétées exclusivement comme des différences
linguistiques (ce qui est parfois le cas, mais pas toujours) et la
graphie médiévale n‟est pas considérée comme utilisable dans le
présent.
Au
début du XIXe siècle, deux types de graphie sont utilisés en
Provence :
La
graphie dite des trouvères marseillais, issue
des traditions d‟écriture des XVIIème et XVIIIème siècles et
des choix effectués pas Achard en 1784 dans son Dictionnaire de
la Provence. C‟est une graphie
étymologique et grammaticale, elle emprunte certaines
conventions à la graphie française : [u] est noté ou, []
est noté gn, [] final atone issu de Alatin est noté o,
mais elle rétablit la graphie lh, conformément à
l‟usage classique, alors même qu‟en provençal le phonème //
est réduit à /j/ : fuelho, filho; elle note
-s, morphème du pluriel, ainsi que certaines consonnes
finales, disparues de la prononciation en Provence6 :
cantèt („il chanta‟), bec(„bec‟),
prim(„mince‟, prononcé
[pri ]), leismeissouns(les
moissons), nuech(nuit)7. Pour simplifier,
on peut dire que cette graphie se situe à mi-chemin entre les deux
graphies actuellement en usage.
Des
graphies phonétiques spontanées plus ou moins anarchiques et
utilisant les conventions de l‟orthographe française pour
représenter les sons. Ce type de graphie est utilisé par des
poètes tels que Victor Gélu (1806-1885) ou Gustave Bénédit
(1802-1870).
En
1846, la graphie adoptée par le docteur Honnorat, de Digne, dans son
Dictionnaire provençal-français ou Dictionnaire de la langue
d’oc ancienne et moderne, reste assez proche de la graphie des
trouvères marseillais mais représente un pas de plus vers la
restauration des usages classiques par la notation -a de la
voyelle issue de A latin post-tonique (réalisée majoritairement []
ou [], mais aussi [a] dans certaines zones). Il en est de même
pour la graphie de Damase Arbaud, éditeur des Chants populaires
de la Provence (2 vol., 1862-1864) qui rétablit le graphème -tz
de la 2ème personne du pluriel des verbes, passé à
[s] ou totalement amuï dans la prononciation, le mde
la 1ère personne du pluriel (noté
jusque là n, l‟opposition
/m/-/n/
étant neutralisée en finale) et le -rde l‟infinitif
(amuï en occitan moderne). [21/22]
4
La graphie du projet DIGaM (Dictionnaire du Gascon Moderne),
préconisée par Jean Lafitte pour le gascon, s‟éloigne sur un
certain nombre de points de la graphie normalisée (ou“occitane”)
proprement dite, mais s‟incrit dans le cadre des mêmes choix
fondamentaux et doit donc être considérée comme une variante de la
graphie normalisée.
5
On parlera de graphie mistralienne (proprement dite),
uniquement en ce qui concerne le provençal car c‟est pour ce
dialecte qu‟elle a été conçue et codifiée de façon rigoureuse,
pour les autres dialectes on parlera de “graphies d‟inspiration
mistralienne”.
6Mais pas dans d‟autres régions comme le
Languedoc ou la Gascogne.
7
Exemples tirés des Oeuvres provençales du docteur L.
D’Astros, Aix-en-Provence, 1867.
La
graphie dite mistralienne, mise au point en réalité par Joseph
Roumanille, représente un compromis entre la graphie des trouvères
marseillais et les graphies phonétiques spontanées, mais elle
laisse de côté la tradition ancienne et la pan-occitanité. Elle ne
sera adoptée qu‟avec réticence en 1853 par Mistral, alors âgé
de 23 ans, sous la pression de Roumanille8. En effet
Mistral qui admirait l‟oeuvre d‟Honnorat avait commencé à
composer son poème Mirèiodans une graphie proche de
celle des trouvères marseillais.
Par
rapport à la graphie occitane normalisée, la graphie mistralienne
est davantage basée sur les conventions orthographiques du français
: /u/ est noté ou, // est noté o, // : gn,
la voyelle issue de A latin post-tonique (réalisée majoritairement
[] mais aussi, localement [] ou [a]) est notée o. De
plus, elle ne note pas -s morphème du pluriel ni certaines
consonnes finales amuïes dans la prononciation en provençal mais
qui se retrouvent dans la dérivation ou dans certaines liaisons (et
qui sont prononcées dans d‟autres dialectes).
Exemples
:
graphie
mistralienne
graphie
occitane
[kanta]
canta
cantat
chanté
[kan'tad]
cantado
cantada
chantée
[kan'ta]
canta
cantats
chantés
[kan'tad]
cantado
cantadas
chantées
[lu
sa]
lou
sa
lo
sac
le
sac
[la
'sak]
la
saco
la
saca
le
“gros sac”
[lej~li
'sak]
lei~li
saco
lei
sacas
les
“gros sacs”
[la
ne]
la
nue 9
la
nuech
la
nuit
[net
e du()]
nuech
e jour 10
nuech
e jorn
nuit
et jour
La
graphie mistralienne écrit également la mountagno, li~lei
mountagno, l’espalo, cantas, voulèn là
où la graphie occitane écrit la montanha, lei montanhas,
l’espatla, cantatz,
On
peut donc dire que la graphie mistralienne est plus strictement
phonologique que la graphie occitane, et aussi plus phonétique dans
le sens ou le rapport graphie-phonie y est plus immédiat et plus
explicite. Mais de ce fait même elle a tendance à survaloriser les
différences dialectales et à rendre l‟intercompréhension plus
difficile. Au contraire, la graphie occitane est un moyen efficace
de gérer la variation tout en évitant d‟imposer un standard
linguistique univoque. [22/23]
On
peut dire également que la graphie mistralienne est simple
à l‟apprentissage et à l‟encodage, mais plus difficiles au
décodage (du moins pour un locuteur possédant une variété
différente de la variété transcrite).
Dans
les académies d‟Aix-en-Provence et de Nice, les deux graphies
sont enseignées. Dans les années 1970 une circulaire du
recteur de Nice, préconisant l‟usage exclusif de la
graphie mistralienne a été annulée par le Conseil d‟Etat.
Les
deux graphies en présence ont chacune sa légitimité, mais il
s‟agit de légitimités différentes : dans le cas de la graphie
occitane on a affaire à une tradition ancienne qui a été
interrompue et restaurée, dans le cas de la graphie mistralienne à
une tradition récente (150 ans)
8
En témoignent plusieurs lettres de Mistral, notamment une
lettre du 14 août 1853 à Roumanille et une du 9 octobre 1853 à
Anselme Mathieu.
9
Ou la niue [la njø] en provençal rhodanien.
10
Ou niuech e jour [njøts e dzur] en provençal
rhodanien.
mais
ininterrompue. Dans la situation actuelle, il est illusoire de penser
qu‟une des deux graphies peut éliminer l‟autre. Les
deux courants, occitaniste et provençaliste, se sont
longtemps opposés de manière assez violente sur la question de la
graphie ; mais actuellement on assiste à un déplacement du débat
qui est de plus en plus un débat entre d‟un côté, ceux,
provençalistes et occitanistes, qui acceptent la pluralité de
graphies et de l‟autre une minorité agissante qui veut imposer
l‟usage exclusif de la graphie dite mistralienne. En effet, on a
vu, ces dernières années, se dessiner la possibilité d‟un
consensus tendant à affirmer l‟équivalence des termes occitanet langued’oc, prenant
acte de l‟existence de deux graphies en usage et affirmant
la nécessité de gérer ensemble cette situation, dans le respect
mutuel et sans chercher à imposer un monopole d‟une des deux
graphies. Cette ligne de conduite a été affirmée solennellement à
Marseille en novembre 1999 par les responsables des deux principales
organisations représentatives du mouvement culturel : le capoulié11
du Félibrige12 et le président de l‟IEO13.
Cependant
une fraction radicale du courant provençaliste refuse ce consensus,
continue à entretenir la polémique et à préconiser l‟usage
exclusif de la graphie mistralienne présentée comme la seule
graphie authentiquement provençale. Cette situation est
fondamentalement nuisible pour l‟avenir (déjà bien compromis) de
la langue et de la culture d‟oc en Provence car elle met certains
élus en situation de pouvoir jouer les uns contre les autres en
fonction de leurs intérêts électoraux. Elle leur donne de plus un
excellent prétexte pour ne rien faire. Récemment, on a vu un
rapport sur la langue et la culture régionales en région PACA, qui
s‟efforçait de promouvoir une voie consensuelle et proposait de
développer un certain nombre de projets concrets, enterré par le
président du Conseil régional qui l‟avait lui-même commandé, à
cause des pressions exercées par les provençalistes radicaux.
Enfin,
il faut signaler deux tentatives de création de graphies
intermédiaires :
Dans
les années 70, un groupe de travail qui se réunissait au Centre
Culturel de Cucuron (Vaucluse), a proposé une version simplifiée
de la graphie occitane que ses promoteurs ont appelée graphie
classique de base. Par rapport à la graphie occitane « stricte
», cette graphie se caractérise essentiellement par les traits
suivants : [23/24]
simplification
des groupes consonantiques réalisés comme des consonnes simple en
provençal : espala au lieu de espatla (épaule),
semana au lieu de setmana (semaine), pessegue au
lieu de persegue(pêche)…
finale
[je] de l‟imparfait et de certains substantifs féminins notée
-iéau lieu de –iá.
phonème
/d/ en position intervocalique noté par le seul graphème j
(ou g devant e et i) au lieu de tjou j(tgou gdevant eet i)14 suivant
l‟étymologie.
abandon
du graphème -tz en finale de mot, au profit de -s,
sauf dans les deuxièmes personnes du pluriel des verbes : gròs,
las, pos, dès, plas, cantatz au
lieu de gròs, las, potz, dètz, platz, cantatz
(gros, fatigué, puits, dix, il plait, vous chantez).
Un
recueil de textes à vocation pédagogique15 a été
publié en 1982 dans cette graphie et récemment un Manuel
pratique de provençal contemporain16. Bien qu‟elle
soit utilisée occasionnellement par certains rédacteurs d‟articles
de presse (notamment dans le mensuel Aquò d’Aquí), elle
n‟a pas donné lieu, jusqu‟à présent, à une production
significative ; la quasi totalité des textes publiés en
provençal, l‟étant dans l‟une ou l‟autre des deux
graphies précédemment décrites.
11
Capoulié : président du Félibrige.
12
Félibrige : Organisation fondée en 1854 par Frédéric
Mistral.
13IEO: Institut d‟Etudes Occitanes
(fondé en 1945).
14
Voir annexe 2 ; en occitan médiéval et dans certains parlers
actuels, tj correspond à une affriquée tendue ou géminée
et j à une affriqué relachée ou une fricative.
15
Lo provençau dei vaus e dei còlas : testes occitans de
Provença en parlar dau Liberon per ensenhar la
lenga.
Centre Culturau Cucuronenc, 1982.
16
Par Alain Barthélemy-Vigouroux et Guy Martin (voir
bibliographie)
Au
début des années 80, le professeur Jean-Claude Bouvier, avait
proposé une graphie mixte notant les voyelles comme le fait la
graphie mistralienne et les consonnes comme le fait la graphie
occitane (il est à remarquer qu‟une telle graphie n‟est pas
très éloignée de celle des
«
trouvères marseillais » du début du XIXème siècle). Cette
proposition, qui à l‟époque n‟avait pas eu de suite, a été
reprise en 1999 par une association intitulée « Dralhos Novos : per
l‟unitat grafico » ; mais jusqu‟à présent, aucun texte n‟a
été publié dans cette graphie.17
De
telles initiatives partent d‟intentions louables (un souci
pédagogique pour la première, une volonté d‟unification pour la
seconde). Mais le danger est que, si l‟usage de ces graphies se
développe, on se retrouve, non plus avec deux, mais avec quatre
graphies ; ce qui rendrait la situation en Provence, non seulement
insoluble, mais encore ingérable.
Occitan
standard et occitan élaboré
On
a vu qu‟il existe une norme graphique englobante. Mais, pour
autant, quelle langue écrit-on ? Ecrit-on en langue vernaculaire
avec une graphie englobante ? La réponse est négative ;
généralement, les formes écrites de la langue sont des formes
“élaborées”. [24/25]
La
notion de langue élaborée, empruntée à la
sociolinguistique corse18, nous semble un concept utile
pour l‟analyse des pratiques de langues en situation
de minorisation et dialectalement fragmentées, mais dotées,
comme l‟occitan, d‟une tradition d‟écriture. On
s‟efforcera de la définir par rapport à la notion de standard :
Le
standard est une norme théorique, résultat d‟un processus
volontaire de standardisation et de codification. On dira que c‟est
la norme des normalisateurs. Il existe des formes standard
d‟occitan, que ce soit l‟occitan standard général (ou
référentiel, ou largeou
fédéral) proche des parlers languedociens, ou des
tentatives plus ou moins abouties de créer des standards
dialectaux. Ces formes standard son plus ou moins bien acceptées
par les utilisateurs et s‟incarnent plus ou moins dans leurs
pratiques.
La
langue élaborée est la norme des utilisateurs telle qu‟elle
se dégage des pratiques d‟écriture ou de l‟activité militante
ou associative, c‟est donc le produit d‟une pratique sociale
(littéraire, associative, militante...), même si cette pratique
reste très marginale par rapport à la société globale. La langue
élaborée se distingue du vernaculaire pur mais elle n‟est pas
toujours codifiée de façon explicite et peut laisser une certaine
place à la variation interne ; elle peut être plus ou moins
proche d‟un standard théorique. On peut également la définir
comme l‟ensemble des pratiques linguistiques autres que la
pratique vernaculaire quotidienne ; elle englobe donc les
notions de langue littéraire et de langue écrite,
mais ne se limite pas à celles- ci.
On
dira aussi que le standard est une norme explicite ; la langue
élaborée, une norme implicite.
Il
existe différentes variétés d‟occitan élaboré qui ne recoupent
pas toujours les dialectes tels qu‟ils sont définis par les
dialectologues :
Le
provençal rhodanien littéraire : il est parfaitement codifié d‟un
point de vue linguistique. C‟est pour transcrire cette variété
qu‟a été élaborée la graphie dite mistralienne. Dans le cas du
provençal rhodanien, il y a quasi-coïncidence entre langue
élaborée et standard théorique.
avait
jeté dix feuilles dans le puits en quatre semaines) s‟écrirait :
aquesteviatgeaviágitatdètzfuelhas dins lo potz en quatre
setmanas, en graphie occitane “stricte” ; aqueste viage
avié gitat dès fuelhas dins lo pos en quatre semanas en
graphie “de Cucuron” ; aqueste viatge avié gitat dètz
fuelhos dins lou poutz en quatre setmanos en graphie “Dralhos
Novos” ; aqueste viage avié gita dès fueio dins lou pous en
quatre semano en graphie mistralienne.
18
Jean CHIORBOLI, La langue des corses. Notes linguistiques
et glottopolitiques, S.n.e. Bastia, 1992.
Il
existe également un provençal commun qui est plutôt le provençal
des occitaniste19, très proche du rhodanien littéraire,
il s‟en écarte sur quelques points de détail dans le sens à la
fois d‟une plus grande prise en compte de l‟ensemble des
parlers provençaux et d‟un plus grand souci de
pan-occitanité (canti plutôt que cante : „je
chante‟ ; ame plutôt que eme : „avec‟...) 20.
Il
existe un niçois littéraire, même si d‟un point de vue
dialectologique le niçois doit être considéré comme une variété
de provençal. [25/26]
Il
existe également un languedocien écrit usuel qui n‟est pas
toujours conforme en tous points aux préconisations des ouvrages de
référence en matière de norme21.
Le
gascon écrit oscille entre une norme béarnisante et une norme plus
pan-gasconne.
Le
limousin littéraire est basé essentiellement sur les parlers du
Périgord et du nord de la Corrèze.
L‟auvergnat
et le vivaro-alpin sont assez peu écrits et on peut dire qu‟il
n‟existe pas de formes élaborées socialement instituées, pouvant
se rattacher à ces dialectes dont généralement les pratiques
d‟écriture procèdent plus directement de la langue vernaculaire.
Une
koinè est en cours d‟élaboration pour les parlers alpins des
vallées italiennes. Il s‟agit là d‟un standard théorique. Mais
il sera intéressant de voir si ce standard théorique va donner lieu
à l‟émergence d‟une langue élaborée.
L‟existence
de pratiques savantes, culturelles, associatives ou militantes,
mettant en jeu des variétés élaborées, va dans le sens de
l‟unification de la langue, non pas par des processus artificiel de
standardisation (qui sont également utiles à un autre niveau) mais
de façon naturelle, par la communication. De fait, la pratique des
utilisateurs fait que les variétés élaborées d‟occitan tendent
à se rapprocher de plus en plus par le lexique et la syntaxe pour
tendre vers une situation où la langue élaborée, même si elle est
apparemment dialectale, est de plus en plus une langue commune
revêtue d‟un habillage dialectal 22 : un peu comme dans
la tragédie grecque, les couplets lyriques en dorien ne sont pas en
vrai dorien, mais dans un attique habillé à la dorienne. On peut
s‟en réjouir ou le déplorer : il n‟en demeure pas moins que
l‟existence d‟une graphie englobante et de variétés
élaborées fonctionnant dans un sens convergeant, sont une
condition nécessaire (mais sans doute pas suffisante) à une
certaine survie de la langue, dans une situation où on peut
prévoir que la pratique vernaculaire héritée aura totalement
cessé dans une trentaine d‟années.
Références
bibliographiques
ACHARD,
Dictionnaire de la Provence, 1784.
ALIBERT
(Louis), Gramatica occitana segon los parlars lengadocians,
Tolosa (Toulouse), 1935 ; 2ème édition, CEO,
Montpelhièr, 1976 ; 3ème édition, IEO, Tolosa, 2001.
ARBAUD
(Damase), Chants populaires de la Provence, tome 2, 1864
(Introduction pp. I-LI). BARTHELEMY-VIGOUROUX (Alain) et
MARTIN (Guy), Manuel pratique de provençal contemporain.
Edisud, 2000. [26/27]
BEC
(Pierre), Manuel pratique de philologie romane. A. et J.
Picard, Paris, 1970 ; tome I, pp.395-554. BEC (Pierre), « Per
una dinamica novèla de la lenga de referéncia : dialectalitat de
basa e diasistèma occitan », Annales de l’Institut d’Etudes
Occcitanes, 4ème série, tome II, n° 6, 1972 ; pp.
39-62.
BEC
(Pierre), Manuel pratique d’occitan moderne. Picard,
Paris, 1973.
BEC
(Pierre), La langue occitane. Coll. « Que sais-je ? » n°
1059, PUF, Paris, 1995, 6ème édition.
BEC
(Pierre) et ALIBERT (Louis), L’application de la
réforme linguistique occitane au gascon. IEO, Toulouse, 1952 (8
p.) ;
19
Même si certains occitanistes écrivent en rhodanien (mais en
employant la graphie occitane).
20C‟est, par exemple, le provençal utilisé dans Mesclum,
la page occitane hebdomadaire du quotidien La Marseillaise.
21Grammmaired‟Alibert, Compendide P. Sauzet... (voir bibliographie) ; ces ouvrages ne sont
d‟ailleurs
pas
forcément toujours d‟accord entre eux.
22
Patrick Sauzet parle de stylisation des différences
dialectales.
BELMON
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Le
graphème aen finale post-tonique, correspond à un
phonème qu‟on a représenté par /Å/, qui s‟oppose à /e/, /i/,
/u/,
/y/
et se réalise localement [], [], [], [a]. Dans certains
sous-systèmes qui neutralisent l‟opposition //-/u/ en finale
post-tonique, /Å/ peut prendre le timbre [u] (provençal rhodanien).
D‟autres sous-systèmes neutralisent l‟opposition
/Å/-/e/
en [] (gascon occidental)
système
général à 5 voyelle post-toniques :
a/Å/ []~[]~[a]~[]24 ; e /e/ [e] ; i
/i/ [i] ; o/u/ [u], u/y/
[y]
sous-système
à 4 voyelles post-toniques : a, (o)25
/Å/ []~[u] ; e /e/ [e] ; i /i/ [i] ; u/y/ [y]
sous-système
à 4 voyelles post-toniques : a, e//
[] ; i/i/ [i] ; o/u/ [u] ;
u/y/ [y] [29/30]
Dans
[kw], forme caractéristique du provençal central et maritime,
[w] provient de la vocalisation de [p] final. Dans la pratique, la
graphie de cette forme n‟est pas homogène, certains écrivent
còp, considérant que cette forme peut englober
[kw], d‟autres écrivent còup.
Le
signe ~ signifie que les éléments cités sont des allomorphes, il
sépare ici différentes variantes phonétiques géographiques ;
«
a/Å/ []~[]~[a]~[] » doit donc être
lu : « le graphème a, représente un phonème /Å/ réalisé
localement [], [], [a] ou [].
Les
parlers qui, comme le provençal rhodanien, neutralisent
l‟opposition -a// -o/u/, ont tendance à éliminer les finales en o []~[u] au
masculin, soit par changement de genre : lopíbol[lupib~u] > lapiba[lapib~u]
(le peuplier), soit par changement de classe morphologique : locòdol[lukdu] > locode[lukde] (le caillou).
1/ d/ graphié j, ou /j/ graphié i(ex. assajar/asa da/ ou assaiar/asaja/).
Représentation
phonétique
A
B
C
D
A1
A2
A3
C1
C2
D1
D2
D3
3
D4
achorrar
[t]
[tj]
[]1
[t]
[t]
[ts]
[t]
[ts]
[s]
[]
viatjar
[d]
[dj]
[dj]
[t]
[t]
[ts]
[d]
[dz]
[z]
[]
assajar
[]
[j]
[j]
[(d)]
[t]
[ts]
[d]
ou
i [j]1
[dz]
ou
i [j]2
[z]
ou
i [j]2
[]
ou
i [j]2
1Dans ce cas il y a neutralisation de l‟opposition /t/ -
// (// distinct de /s/ et de /t/ est un phonème
particulier au gascon et au languedocien aquitano-pyrénéen).
2[d] graphié j, ou [j] graphié
i(ex. assajar[asa da]
ou assaiar[asaja]
3lorsqu‟on a ch[s] et tj[z], on a toujours s[] et z(ou VsV) [], il n‟y a donc pas
neutralisation de l‟opposition entre
ch
et s, ou tj et z (ou
VsV)
A1
: gascon oriental et languedocien aquitano-pyrénéen.
A2,
A3 : gascon occidental.
B
: Bitterois, Nord-Aveyron, Lozère.
C
: languedocien oriental et septentrional
D
: nord-occitan (D1, D2, D3, D4), provençal (D1, D2).
N.B.
On remarquera que, même si le type A n‟était pas attesté,
l‟utilisation des trois graphème ch, tj, j, serait
nécessaire au maintien d‟une graphie unitaire englobant les types
B, C et D. [31/32]
ANNEXE
III.
Cette
annexe présente un texte transcrit dans différents dialectes et
dans différentes graphies accompagnées d‟une notation phonétique.
La version originale est la version limousine extraite de : Jan
GANHAIRE, Lo darrier daus Lobaterras, IEO, 1987, p. 55). Les
textes 1 à 5 relèvent d‟un type de langue élaboré (littéraire)
et leur transcription phonétique représente une prononciation
théorique “moyenne” ; le texte 6 est une auto-production
s‟efforçant de reproduire le plus exactement possible un parler
vernaculaire acquis en partie par transmission familiale.
Le
indiquant la nasalité est placé à côté de la voyelle, et
non au dessus, afin de signifier qu‟il ne s‟agit pas de
véritables voyelles nasales comme en français standard, mais de
voyelles orales pourvues d‟un apendice nasal (sauf dans le texte
n° 6 où on a de véritables nasales). (On pourrait également
noter )
[]
= [d] rétroflexe.
R
apical est noté [r], R uvulaire est noté [] ; l‟opposition
entre un [r] apical bref et un [r] apical long n‟est notée
qu‟en position intervocalique (en position non intervocalique le
/r/ est normalement long = à plusieurs battements). En limousin
(texte 1), il n‟y a qu‟un seul type de /R/, réalisé localement
[r] ou [] (parfois, dans un même lieu, [] par les jeunes et
[r] par les vieilles générations) ; en gascon et en languedocien
(textes 2 et 5) on a, en position intervocalique, une
opposition /r/-/r/ ; en provençal (texte 3), une
opposition /r/-// ; dans le texte n° 6, une opposition
//-/r/ ; en niçois il existe un seul type de R,
classiquement décrit comme apical par les grammaires
normatives, mais que la plupart des locuteurs actuels réalisent []
uvulaire. (N.B. : dans les deux annexes précédentes, on a
négligé la distinction entre [r] et [] ainsi que celle entre[s]
et [s], [z] et [z], [a] et []).
Les
parenthèses ( ) indiquent qu‟un élément est facultatif
lorsqu‟il s‟agit d‟un mot ; qu‟il n‟est pas présent dans
toutes les sous-variétés concernées lorsqu‟il s‟agit d‟un
son.
Lorsqu‟on
cite plusieurs variantes d‟un même élément, ces variantes sont
séparées par des barres obliques penchées à gauche (anti-slashs)
: \ \ .
(\
\) : variante considérée comme marginale, ou minoritaire, dans la
norme graphique ou dans la variété considérée.
N.
B. Le languedocien et le gascon connaissent des spirantes sonores
; mais la différence entre spirantes sonores et occlusives sonores
n‟est pas phonologique, elle est purement contextuelle.
TRADUCTION
FRANÇAISE
Après
presque une lune, nous fîmes escale dans une île. Le port
s‟appelait Famagouste. Nous pûmes y embarquer de l‟eau douce, de
la viande et des fruits qui n‟avaient rien à voir avec nos pommes
et nos (petites) poires : la peau en était comme du velours et la
chair en était un peu filandreuse, mais agréablement sucrée et
aqueuse. Je ne compris pas le nom que lui donnaient les gens de ce
pays ; mais les plus anciens d‟entre nous, ceux du voyage
précédent, l‟appelaient d‟un nom latin, persica,
c‟est-à-dire : le fruit de Perse. [32/33]
LIMOUSIN
graphie
normalisée (dite occitane) Après una luna gaire mens,
faguèremescala
[pre
un lyn gjreme fgeren ejkal graphied’inspirationmistralienne Aprê
uno luno goire mens fogueren eicalo dinsunailla.Lopòrts‟apelavaFamagosta.Ipoguèremembarcardel‟aigalena,
din ynil lu pr pelav fmgut i
pugeren embrka de lejg len,
dins
uno ilo.Lou port s’opelavo Fomogûto. I pougueren emborcâ de
l’eigo leno,
de
la vianda e de la frucha que aviá pas res a veire emb nòstras
pomas e nòstres de l vjnd e de l
fru(t)s ke vj pa re vejre e ntra
\puma\puma\ e ntrej deloviondoedelofruchoqueoviopârêoveireennôtrâpoumâenôtrei
perons
: la peu n‟era coma dau velós e la charn n‟era un pauc
filandrosa mas
peru
la pew nerkum dw velu e la (t)sar ner u
paw filndru ma
peroû
: lo peu n’ero coumo dóu veloû e lo char n’ero un pau
filondrouso mâ
agradivament
sucrada e aigosa. Comprenguí pas lo nom que li donaven la gent
grdivme
ykrad e ejgu kumpre gi pa lu nu ke li
dunave l (d)ze
ogrodivoment
sucrado e eigouso. Comprenguí pâ lu nom que li dounaven lo gent
Graphie
d’inspirationmistralienne Après
\Aprèp\ gairebé uno luno, faguèremescaladinsunailla.Lopórts‟apelavaFamagosta.Ipoguèremembarcar fren
eskl dinz yn ill lu pr spel
fmust i puren embrk fren
ehkl din yn ill lu pr pel
fmust i puren embrk
faguèren
escalo dins uno illo Lou port s’apelabo Famagousto. I pouguèren
embarca
d‟aiga
lena, de carn e de \frucha\fruta\ qu‟aviá pas res a \veire\véser\
amb(e)
dj
len de kr e de \fryt\fryt\ kj
\pr\pj\ rez \ejre\eze\ \n\mbe\
dj
len de kr e de fryts kj \pr\pj\ re
ejre \n\mbe\
d’aigo
leno, de car e de \frucho\fruto\ qu’abio pas res a beire amb(e)
nòstras
pomas e nòstres perons : la pèl n‟èra coma de velós e la carn
n‟èra un
nstrs
pumz e nstres perus l pl nr
kum de eluz e l kr nr yn
nstrh
pum e nstreh peruj l pl nr kum
de elu e l kr nr yn
nostros
poumos e nostres perous : la pel n’èro coumo de velous e la carn’èro un [33/34]
pauc
filandrosa mas agradivament sucrada e aigosa.
Comprenguèri pas lo pw filndruz mz
grimen sykr e juz
kumprengri \pl\pj\ lu pw filndru m
grimen ykr e ju
kumprengri \pl\pj\ lu pauc filandrouso mas
agradivoment sucrado e aigouso. Coumprenguèri pas lou nom que
li donavan lo monde d‟aquel país ; mas los
mai ancians
nun
ke li \unn\-u\ lu munde kel pis
\mz\mj\ \luz\luj\ mj nsjz nun ke li
unu lu munde kel pi mj luj mj
nj noumqueli
dounabouloumounded’aquel païs ;
maslous mai
ancias
d‟entre
\nosautres\nautres\, los del viatge d‟abans, l‟apelavan d‟un
nom latin,
dentre
\nuzwtres\nwtres\ luz del bite
n \lpeln\-u\ dyn nun lti,
entre
\nuwtrej\nwtrej\ luj del bitse n
lpelu dyn nun lti, d’entre
\nousautres\nautres\,
lous del biache
d’abans, l’apelabou
d’unnoum latí, persica,
valent a dire la \frucha\fruta\ de Pèrsia.
Graphie
normalisée (dite occitane) Après quasi una luna,fagueriam
[aps
kasi yn lyn fagerjan
Graphie
mistralienne Après quàsi uno luno, faguerian escala
dins una \iscla\illa\. Lo pòrt \s‟apelava\se disiá\ Famagosta. I
(\ié\li\) eskal di z yn \iskl\il\ lu p
\sapelav\se dizje\ famagust i (\je\li\) escalo
dins uno \isclo\ilo\ .Lou port \s’apelavo\se disié\ Famagousto.Ié
(\li\i\) pogueriamembarcard‟aigalena,decarnedefruchaqu‟aviá(pas)renavèirepugerjan
embaka dajg len de ka e de \fyt\fyts\
kavje (pa) en a vjre pouguerianembarca d’aigoleno, de care defruchoqu’avié (pas)
renavèire
\am(b)e\em(b)e\
nòstrei pomas e nòstrei perons. La pèu n‟èra coma\-e\
\ame\em(b)e\
\n(w)sti\-tei\ pumo e \n(w)sti\-tei\ peru la
pw nrkum (\-e\)
emé
\ nostri \-trei\ poumo e \nostri\-trei \ peroun. La pèu n’èro
coume (\-o\)
de
velós e la carn n‟èra un pauc filandrosa mai agradivament sucrada
e aigosa.,
de
veluz e la ka nr u pw filanduz maj
agadivame sukad e ejguz
de
velous e la car n’èro un pau filandrouso mai agradivamen sucrado e
eigouso
Comprenguèri\-re\pas
lo nom que li (\ié\) donavan lei gènts d‟aqueu país ;
\kumpe
gri\-re\ pa lu nu ke li (\je\) dunavu \lej\li\
\den\dzn\ dakew pais Comprenguère (\-ri\)pas lou nom
que ié (li) dounavon li (\lei\) gènt d’aquéu païs ; mai
lei mai ancian d‟entre \nosautres\nautres\, aquelei dau viatge
maj
\lej\li\ maj a sja dente \nuzawte\nawte\
\akeli\-lej\ dw \vjade\vjadze\ mai li (\lei\) mai
ancian d’entre \nousautre\nautre\,aqueli (\-lei\) dóu viage
d‟avans, l‟apelavan d‟un nom latin, persica, valènt a
dire la frucha de Pèrsia. dava
lapelavu dy nu lati persica
valnt a dire la \fyt\-ts\ de
\psi\-sj\]
d’avans,
l’apelavon d’un noum latin, persica, valènt a dire la
fruchodePèrsi(o). [34/35]
NIÇOIS
Graphie
normalisée (dite occitane) Après esquasi una luna,fagueriam
[apz
eskasi yna lyna, fagejan Graphie d’inspirationmistralienne Après esquasi una luna,
faguerian escalaenunailla.Lopòrt\s‟apelava\sidiia\Famagosta.Lipogueriamembarcar eskala
en yn ila lu pte \sapelava\si diia\
famagusta li pugeian embaka escala en una ila. Lou
port \s’apelava\si diía\ Famagousta. Li pouguerian embarcà d‟aigalena,decarnedefruchaqu‟avia(pas)renavèireembai\nòstru\noastru\
dajga
lena de ka e de fyta kavia (pa) en a vɛje
embaj nwasty
d’aiga
lena, de car e de frucha qu’avia (pas) ren a veire embai nouostru
poms
e „mbai \nòstru\noastru\ purús. La pèu n‟èra coma de velós e
la carn n‟èra
pum
e mbai nwasty pyy la pw na kuma
de velus e la ka na poum e’mbai nouostru peron. La pèu n’èra couma de velous e la
car n’èra unpaucfilandroamaagradivamentsucradaeaigoa.Noncomprenguèrilonom u paw filandua ma agadivame
sykad e ajgua nu kumpe gi lu nu un
pau filandroua ma agradivamen sucrada e aigoua. Non comprenguèri lou
nom quelidonavanlagèntd‟aqueupaís;malumaianciansd‟entrenautres,aquelu ke
li dunavu la gɛnte dakew pais ma ly maj a
sja dente nawte akely que li dounavon la gent
d’aquéu païs ; ma lu mai ancian d’entre nautreaquelu
dau
viatge de denant, l‟apelavan d‟un nom latin, persica,
valènt a dire la
dw
vjade de dena lapelavu dy nu lati ,
persica, valent a die
la
dóu
viage de denant, l’apelavon d’un noum latin, persica,
valènt a dire la
frucha
de Pèrsia.
fyta
de psja.]
frucha
de Pèrsia.
GASCON
26
Graphie
normalisée (dite occitane) Après quasi ua lua, quehasom
Graphie
DIGaM Après quasi ua lua, que hasom
gascon
oriental [prs kzi yw lyw
ke hzum
gascon
occidental [prs kzi yw lyw
ke hzum Graphie deL’ EscòlaGaston
Febus Aprèsquasiuelue,
quehasoum escala
en ua illa. Lo pòrt que s‟\aperava\aperaua\ Famagosta. Qu‟i
podom escala en ua illa. Lo pòrt que s’\aperava\aperaua\
Famagosta. Qu’i podom eskl en yw ill
lu pr ke s \per\perw\ fmust ki
pudum eskl en yw ill lu pr ke s
\per\perw\ fmust ki pudum
escale
en ue ille. Lou port ques’aperabeFamagouste. Qu’ i poudoum embarcaraigadoça,
carnehrutaqui n‟\avè\auè\pasarrena\véder\véser\
dab embarcar aiga doça, carn e
hruta qui n’\avè\auè\ pas arré a \véder\véser\ dab embrk
j dus kr e (h)ryt ki n \\w\
pz re eze db embrk j
dus kr e (h)ryt ki n \\w\ pz
re \e\ez\ db
embarca
aigue douce, car e rutequin’abè pas
arré a \béde\bése\ dab [35/36]
las
nostas pomas e los nostes perons : la pèth que n‟èra
com velós e la carn las \nostas\-es\ pomas e los nostes
perons : la pèth que n’èra com velós e la carn lz
nusts pumz e luz nustes peru( )s
l pt() ke nr kum belus e l kr lz
nusts pumz e luz nusts peru(
)s l pt(j) ke nr kum belus e
l kr
las
noùstes poumes e lous noustes peroûs : la pèt que n’ère coum
belous e lacar
Je
dois remercier Jean Lafitte pour ses corrections et suggestions,
ainsi que pour la transcription en graphie DIGaM.
n‟èra
un chic \hilandrosa\estopuda\ mes agradivament sucrada e
n’èra
un chic \hilandrosa\estopuda\ mes agradivament sucrada e
nr
y tik \hilndruz\estupy\ mes
grimen sykr e
nr
y \ik\tjik\ \hilndruz\estupy\ mes
grimen sykr e
n’ère
û chic \hilandrouse\estoupude\ mes agradibement sucrade e
aigassuda(\aigosa).\Ne\(No)\ comprengoi pas lo nom que‟u
\davan\dauan\ la gent aigassuda(\aigosa\). \Ne\(No)\
comprengoi pas lo nom que’u \dàvann\dàuann\ la gent
jsy
(\juz\) (nu) kumprenguj pz lu num ku
\n\wn\ l en
jsy
(\juz\) ne kumprenguj pz lu num ku
\n\wn\ l jen aygassude(\aygouse\). Ne
coumprengouy pas lou noum que’u dàben la gen d‟aqueth
país ; mes los mes ancians d‟enter
\nosautes\nosaus\, los deu viatge d’aqueth país ; mes los
mes ancians d’enter \nosautes\nosaus\, los deu viadge dket()
pis mez luz mez nsj( )z
dente \nuzwtes\nuzws\ luz du bjde
dket(j) pis mez luz mez nsj( )z
dent \nuzwts\nuzws\ luz du
bjdj d’aquet païs mes lous mes anciâs d’enter
\nousautes\nousaus\ lous dou biàdje d‟\abans\auans\ , que
l‟\aperavan\-auan\ d‟un nom latin, persica,
valent a díser:d’\avantz\auantz\ que
l’\aperàvann\-àuann\ d’un nom latin, persica, valent a díser:
\ns\wns\
ke \lpern\-wn\ dy num lti(
) persicablen(t)
dize
\ns\wns\
ke \lpern\-wn\ dy num lti(
) persica blen(t)
diz d’abansquel’aperàben d’û
noumlatî,persica,
balenadìse: la hruta dePèrsia.
la
hruta de Pèrsia.
l
(h)ryt e prsj]
l
(h)ryt e \prsj\prsi\]
la
rute de Pèrsi(e).
ALPINDELAVALLEED‟OULX(Italie)
Parler
de Chaumont (Chiomonte), province deTurin
Graphie
normalisée (dite occitane) Après viament una luna, nos
l-avemfait
[prej
jm un lyn nu lv
fjteschara dins una illa. Le pòrt aul se mandava Famago·sta.
Nos l-avem pogú eja di z yn
ill l pr us mndav fmgust
nu lv pugy
embarcar-lhi
d‟aiga doça, de vianda e de fruta qu‟il aiá pas ren a veir avei
(\bo\)27
l
nu k la de ke pi i l
dunav ma lu pluz sj dnosautris, „quelosdau voiatgededirant, ilhlhedisiàn
un nomlatin,persica,
nuzawtri kelu du vujae d
di i l dizj y nu lati
, persica, cequelavòl dire: lafrutadePèrsia.
sak
la v die l frytt d prsj]
avei[avj] (fr. avec), forme d‟origine
francoprovençale, est employé uniquement à Chaumont et à Exilles
; dans les autres communes de la vallée d‟Oulx on emploie bo[bu] ou abo[abu].